Ce texte examine, à partir d’actions du Laboratoire de la contre-performance, collectif d’artistes et chercheur·e·s, la manière dont le féminin et l’autorité plurielle peuvent déjouer les règles de l’art. La spectacularisation de rituels de partage ainsi que la mise en scène de corps féminins subalternes y apparaissent comme des stratégies paradoxales d’empowerment. Le geste performatif est pensé dans sa dimension collective, en lien avec la survivance de mythes, comme outil de transmission de subjectivités féminines dissidentes.
Un discours qui nous parlerait plus qu’on ne le comprendrait : n’est-ce pas ce que vise cette forme, relativement présente dans l’art contemporain, qu’est la conférence-performance ? Cette manière d’articuler le savoir et le performatif, de mettre au jour la corporéité d’un énoncé théorique et de mettre en scène l’Inconscient du langage, mène à questionner de nombreuses oppositions comme celle, tenace, entre corps et esprit. La transmission du savoir, loin de la transparence, y apparaît dans toute sa matérialité, liée au corps et à un dispositif d’énonciation. À travers cette forme critique de performance langagière, c’est la ritualisation de la parole « savante » qui se trouve mise en jeu. Ne pourrait-on voir, dans cette incorporation et cette altération du « pur esprit », une résurgence de la figure de l’oracle, ce corps vecteur, traversé par de l’indicible et censé « délivrer » un « savoir » ? Qu’en est-il de la place et du statut du corps, en particulier féminin, dans l’acte de langage et vis-à-vis du savoir ? On suivra, pour nous éclairer, une « visite guidée » de Louise Hervé et Chloé Maillet.