Le mandala comme espace originel, du dessin à la danse, selon C. G. Jung
Résumé
Jung découvre les mandalas à travers une pratique personnelle lors de laquelle il explore l’autonomie de l’inconscient : le mandala qu’il dessine spontanément lui permet à la fois de se connaitre et de se transformer. Il forme alors l’hypothèse que la spontanéité du mouvement de la main rend visible « l’archétype d’ordre », qui est au fondement de l’inconscient. Autrement dit, l’archétype d’ordre remonte (de l’inconscient au conscient) à travers le corps pour se rendre visible, sous la forme d’images archétypiques dynamiques. Sa pratique gestuelle du mandala le conduit à découvrir l’existence d’un autre centre que le moi (centre du conscient), un centre de la totalité (du conscient et de l’inconscient), le Soi. Dans Psychologie et alchimie, il présente le lien entre le processus d’individuation, l’Imagination active et la formation spontanée et progressive des mandalas, à partir d’une série de 400 rêves de Wolfgang Pauli, l’un des pères de la physique quantique. Par ailleurs, Jung observe que certains de ses patients ne dessinent pas les mandalas, mais les dansent : le mandala est alors extériorisé à travers le corps tout entier et reconfigure ainsi l’espace dans lequel s’inscrit le sujet. L’espace vécu n’est plus alors isotrope, il est différencié, orienté et structuré. Une pratique du type danse de mandala se trouve chez le Japonais Morihei Ueshiba, pratique que nous avons pu étudier et réitérer en atelier afin de décrire comment se produit l’émergence du mandala à travers le corps, du corps vivant au corps vécu, et comment elle modifie le rapport que le danseur entretient avec lui-même, avec l’espace et avec autrui. Le mandala constitue un objet « neutre », un tiers médiateur qui dépasse les dualités monde intérieur/monde extérieur, physique/psychique, moi/autrui. L’espace structuré du mandala qui s’impose aux sujets apparaît comme un espace originel où sont encore indifférenciés le monde intérieur et le monde extérieur.