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Des Animaux
DES ANIMAUX. Thierry Boutonnier et Antoine Petitprez
Texte intégral
Exposition inscrite dans le programme de recherche La Chair de l’animal, dirigé par Valérie Boudier et Gilles Froger.
Université Lille 3 / CEAC / École Supérieure d’Art du Nord-Pas-de-Calais Dunkerque-Tourcoing, Galerie Commune, Campus arts Plastiques
Rigoureuse, patiente et réfléchie, l’œuvre d’Antoine Petitprez se constitue de séries photographiques d’animaux, de paysages et de corps. Bien que des glissements puissent se produire entre ces divers registres, ce n’est pas tant une ambigüité que semble chercher l’artiste qu’un point d’équilibre. Ainsi de ces Animaux, taureaux et vaches dont la partie photographiée comprenant l’encolure et la patte antérieure dit à la fois l’animal et le morceau de boucherie. Ou bien de ces Alberi qui sont autant de pieds d’arbres dont la forme animale ou la légèreté des radicelles suggèrent le mouvement autant que l’enracinement. Ou encore de ces Poules endormies que le repliement des ailes et la disparition du cou et de la tête transforment, imposants bilboquets solidement ancrés sur leur perchoir, en boules de sommeil. Enfin, c’est l’humain lui-même qui se voit saisi dans une indécision sur le sexe et le genre quand il apparaît sous la forme d’une série de crânes dénudés. Il y a ainsi, dans le travail d’Antoine Petitprez, un étonnant rapport entre la force d’affirmation de ce qui est montré – affirmation due à la taille des photographies, à la frontalité des figures, à l’absence de décor ou de tout élément anecdotique, à la qualité de la définition – et une capacité à inventer un ailleurs de la réalité prélevée et exposée. Rien, en effet, ne relève plus de l’immédiateté du quotidien – des poules dorment toutes les nuits, les arbres n’en finissent pas de pousser et le crâne rasé est de nos jours très à la mode – et n’engage autant le regard et la pensée.
Gilles Froger
Artiste actif et réactif, Thierry Boutonnier déploie un large panel de comportements individuels en réaction au système capitaliste et à son biopouvoir : analyse, jeu, combat, mimétisme, démission, dérision, ironie, crise... Professionnel, il envisage l’acte artistique avec les mêmes exigences d’information, de savoir-faire, d’identification d’objectifs, de recherche opérationnelle, d’impératifs décisionnels et de concentration de moyens que n’importe quelle activité de project management. Se revendiquant non-spécialiste, polyvalent et pluridisciplinaire, il utilise tous les moyens à sa disposition : performances, vidéos, sculptures, images et photographies, schémas, publications… Sous couvert d’une démarche artistique pleine d’ironie et d’actions parfois burlesques, Thierry Boutonnier aborde des choses graves qui nous animent, nous traversent et qui sont le plus souvent universelles (l'autre, l'eau, la puissance...). Par une réflexion sur la gestion des espèces dites invasives ou considérées comme nuisibles dans une France qui connaît une urbanisation effrénée, il nous montre comment l’acte artistique peut aussi être une stratégie pour libérer ou modifier le statut de certains êtres.
Valérie Boudier
Publié en Avril 2016